Autrefois, on estampillait tout
de nos initiales : son sac, ses chemises, ses mouchoirs, son étui à
cigarettes, ses foulards…
On estampillait tout, de deux
lettres (parfois trois).
On faisait porter le chapeau de
notre nom à nos affaires.
On délimitait son territoire en
commençant par là.
Une propriété, c’était des
champs ou des châteaux ; et des vêtements annotés.
Ce paraphe était la clé d’un
trousseau.
C’était aussi une marque,
c’était celui qui l’avait fait, qui l’avait cousu pour lui même, et qui
apposait son sceau, la finition ultime. Pour que dans les grandes lessives on
ne s’y perde pas. Pour que les tiroirs et les matins ne soient pas confus
d’échanges.
C’était deux lettres (parfois
trois), et ces deux lettres définissaient quelqu’un.
Et elles en devenaient même des
dessins, les hiéroglyphes d’un inconnu, une langue étrangère.
Nos choses se signaient de ces
caractères, qui n’appartiennent qu’à nous, qui sont pleins de notre sous texte,
qui recèlent une identité.
Et comme le dit André Breton
“Nadja, parce qu’en russe c’est le commencement du mot espérance, et parce que
ce n’en est que le commencement”.
Ces deux lettres, et tout leur
mystère, et toutes leurs promesses, avec la pudeur de ne pas en dire plus.
C’était deux lettres (parfois
trois), le début d’un individu, puisque l’individu commence par là, par son
nom, et que lorsqu’il le perd, il se perd.
Demeurent désormais ces habits
avec leurs blasons de voyelles et de consonnes, et ils semblent être chacun une
bribe d’une histoire, dont on a l’amorce, mais dont on ne sait comment épeler
la suite.
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