C’est un cercle qui se mord la
queue : j’attends l’hiver chaque été.
J’espère la neige, comme de
l’enfance qui se ressert.
J’espère l’élégance des jours
nés plus tard.
Mais quand j’y suis, je ne veux
pas y rester.
Quand j’y suis, les mois du
milieu me manquent.
Quand j’y suis, je constate que
j’ai plus froid que prévu.
J’avais oublié ce qu’était le
glaçant, le tremblant, le bout du nez gelé, l’engourdissement des mains.
C’est une chose insaisissable,
de ne pas se souvenir physiquement d’une sensation. De ne se rappeler de son
intensité qu’intellectuellement.
Et de la redécouvrir chaque fois
comme si c’était la première, avec excès, dans sa chair.
Mais pas moyen de s’échapper.
Sauf prendre un vol pour un aller vers un clément climat. Mais, entre autres
contres, j’ai peur en avion.
Comment l’abolir, cette
impatience à regagner une saison où le foyer du ciel chauffe sans mentir ?
C’est un détail simple, un acte
gratuit :
Je mets des lunettes de soleil,
à la moindre occasion, dès que les nuages font leur malle un temps soit peu,
dans ces heures de lumière minimum.
Et cela me console. Cela me fait
croire que j’en ai besoin,
de ces verres noircis.
Cela me fait croire que je suis
aveuglée par trop de clarté.
Cela me fait toucher un objet
encore moite, qui sent les grandes vacances dernières.
Et cela amadoue, comme un animal
lentement apprivoisé par une poignée de graines, les beaux jours, les plus
longs.
J’ai envoyé se promener l’hiver.
J’ai maté l’hiver.
Aucun commentaire:
Publier un commentaire